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Chapitre 1
- Ah, mon chéri, tu es revenu ! Je commençais vraiment à m'inquiéter, hein ! Où étais-tu passé ?
J'enlève mes chaussures sur le palier, tandis que ma mère se dirige vers moi, furieuse et inquiète. Les rides du souci et de la fatigue creusent son visage, le rendant de moins en moins avivé et coloré au fil des jours. Elle travaille beaucoup trop. Même si cela ne suffit même pas à joindre les deux bouts. Mais elle continue, elle s'acharne pour m'offrir tout ce dont j'ai besoin, depuis que mon père est parti, nous abandonnant elle et moi, déboussolés, anéantis. Je n'avais que 6 ans, mais je m'en souviens encore aujourd'hui.
Mon père était venu dans ma chambre, un soir d'hiver, le visage fatigué mais ferme. Les yeux ronds, je lui avais demandé ce qu'il faisait dans ma chambre, habillé, un sac sur les épaules et s'il pouvait bien m'expliquer pourquoi il y avait une grande valise, sa grande valise, devant la porte. Silencieux, il s'était assis près de moi, et soudain, pris dans ses bras. Puis il m'avait dit d'une voix empreinte de regret, avant que j'aie eu le temps de comprendre ce qui se passait :
- Sois fort. Ne perds pas courage. Pour ta mère et moi. Je sais que je peux compter sur toi. Je suis désolé.
Il s'était ensuite levé. Dans un silence de mort, la bouche béate, je l'avais regardé quitter la pièce, ne réalisant toujours pas ce qui se passait. Puis la vérité m'avait frappé de plein fouet :
Les murmures entre eux, les sanglots étouffés, tout ça…mon père quitte la maison.
Il ne viendra plus jamais me serrer dans ses bras, la nuit.
Je n'irais plus jamais avec lui à des matchs de foot, manger un sandwich...
Il ne sera plus là pour moi.
Cette vérité m'avait paru insupportable. Mais, avant que je puisse bouger le petit doigt (j'avais prévu de lui sauter dans les bras et de l'empêcher de partir, têtu que j'étais), il m'avait murmuré d'un son parfaitement inaudible, si bien que j'avais du tendre l'oreille pour l'entendre :
- Je m'en vais. Peut être que je reviendrais. Mais pas maintenant. Je dois réfléchir.
Sois sage, sois la pour ta mère quand elle en aura besoin.
"Je t'aime, mon fils."
J'avais hoché la tête même si il ne pouvait pas le voir, ne sachant pas quoi faire d'autre. Je me sentais comme vidé, incapable de bouger. Je n'arrivais même pas à pleurer.
Ma mère était apparue sur le seuil de la porte, le visage en larmes, juste après.
Ils ne se s'étaient pas accordé un regard. Aucun. Ma mère avait juste dit, la voix brisée : Vas-t-en.
Le visage baissé, mon père avait ensuite quitté la pièce.
Puis notre maison. La vie de ma mère. Ma vie.
Laissant nos cœurs à l'abandon, déchirés, marqués à tout jamais.
Cela fait 9 ans maintenant.
Depuis ce jour, ma mère a perdu sa joie de vivre. Je perdis la mienne aussi, à la même occasion.
Quelques jours après, elle entreprit de trouver un boulot pour qu'on puisse s'en sortir sans lui. On l'engagea comme baby-sitter, serveuse, caissière, nourrice, animatrice… et enfin, femme de ménage.
Nous avions déménagé à Lolititle, 4 ans après ce jour tragique.
Et c'est là que je fis la rencontre d'Ever.
Grâce à elle, je pus honorer la promesse faite à mon père. Rester fort et avancer, pendant 5 ans.
Mais plus maintenant.
- Alors, qu'est-ce qui se passe, tu réponds pas ? questionne ma mère, ce qui me fait sortir de ma léthargie.
- Euh, si, si…je pensais juste à quelque chose, je réponds précipitamment.
- Alors ?
- J'étais avec Ever, tu sais, à la bibliothèque, j'explique, mais on s'est attardé sur un banc pour discuter.
- Ah ok, dit-elle, visiblement soulagée. Et tout se passe bien entre elle et toi, donc ?
Je veux lui répondre que non, tout va mal comme jamais, que je l'ai perdu. Pourtant, je réponds :
- Très bien. Ne t'inquiète pas pour ça.
- Ah ok, marmonne encore ma mère, en me fixant étrangement, ce qui me fait donc baisser la tête, pour ne laisser transparaître aucune émotion. Dépose ton sac dans ta chambre, et viens m'aider à préparer le dîner, s'il te plaît. Ensuite, tu feras tes devoirs. Il n'est que 19h, on a le temps.
-D'accord, maman, je réponds, en m'avançant lentement vers l'escalier qui me ramène à l'étage, où il y'a ma chambre, la salle de bains et la chambre de ma mère.
- Je t'attends, mon cœur. Je sens qu'on va passer une bonne soirée.
- J'espère, dis-je d'un ton faussement enjoué.
Puis je m'engage ensuite dans l'escalier, la tête encore envahie de souvenirs douloureux.
FIN